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Des inexistants

  • Venehon
  • 15 mars
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : 18 mars

« La superstition est toujours la traduction d’une certaine impuissance : on remet à une force extérieure un effet qu’on ne sait pas ou plus produire. »


Ainsi pourquoi notre si franc seigneur m’a toujours cru un autre ! C’est que de milles manières je lui échappais ; c’est que de milles manières j’étais un diable pas tout à fait loisible.

Voilà son plus grand reproche à ce grossiste en littérature, me croyant tout autre : c’est qu’il n’ait jamais été moi.

Voilà ce qui l’endommage notre seigneur, c’est qu’il n’est jamais rien su soulever ; c’est qu’il n’ait jamais su opérer aux hommes un peu de force, d’apprêts ou de franchise : c’est qu’il n’est jamais pu infléchir - c’est qu’il aura toujours assisté, toujours rendue sa copie, toujours bibeloter, toujours été inconséquent.

Pour ce qui est des âmes, des cœurs ; qu’il n’ait jamais rien su soulever lui vient sa manie de tout relever.

Il croit ainsi que faute de savoir manier les hommes, fautes de leur « faire de l’effet », faute de les tromper, les tendre, les subjuguer ; les hommes un beau jour se retourneront, jaseront, se déploirent, le couvriront, l’aimeront : « oh regardez moi ce cul plombé, il est parfaitement honnête, il aura tellement dit, tellement, de ce que nous sommes, de ce que nous avons été, de ce que nous serons ! C’est un cul, mes amis, si peu menstrué – et sans émotion, vraiment ! Quel cul d’écrivain, on y mordrait et c’est le pain-de-ses-jours : nous serons nourris comme tant les cieux un jour d’hiver qui nous déverserait Jésus-soubirou ! »


Voyez comme ils seront heureux ces deux-barnums ! Ils s’entreplotteront, s’entrelettreront, s’entrelopetteront. Et les simples seront rendues à leurs bignoux ; ils chercheront en l’homme moyen de quoi le deviser ; ils chasseront pour le conduire tout les manants-diviseurs – ils auront trouvé leur prophète ! Plus donc de ces messieurs-mon-genre ; les comédiens, les écrivains de fictions ! Disons tout les hostiles à la si modique réalité qui leur font du sur-moi ! C’est que notre seigneur « Hollande la Guerre », c’est plus d’une fois vanté d’une modestie sans nom – bientôt voilée voyez-vous, Notre-Dame-des-Grand-Blairs – ils nous affublera de sa pudeur ! Je ne les supporte plus ces petits choristes ; ils me donnent à loisir tout un dictam, me lise une bible en fait et cause et me croit assez bonhomme à les entendre s’annôniner ?

Fermez votre gueule allons, tout les syriaques de la modestie solennelle ! Tout les crevards de la destinée, je vous pisse en diable comme au front comme au cul – vous n’êtes rien tant que des syntagmes, des frais-de-dossiers – vous n’agissez au monde que sous un aspect très-commun, celui d’être une formalité.

C’est parce que vous n’avez pas sorti vos mains, frappez vos jambes – parce que vous n’avez jamais fait une violence ; parce que vous n’avez jamais été au monde qu’un peu de rodomantades, qu’on a rit de vous et de vos crispations – Dieu, au lieu que vous auriez dû vous agrandir, vous croire tout un salaud d’homme et ses merveilles ! Au lieu de bien vous rendre compte que non, oh non la vérité n’était qu’à défaut d’hommes ! Vous avez fait de votre réalisme, vos faits qu’une espèce de fixation, de fixette plutôt selon vos superstitions de cornards ! Car vous êtes cocus mes grands hommes, oh cocu cent-fois par vos femmes et enfants ; ce n’est jamais les philosophes mais les fôlatres qu’au monde nous retenons ! Pas les philosophes du donnant-donnant, du constant, du prismatique ! J’instruis plutôt le schisme et Priape – je crois à un monde qui n’est certes pas le vôtre et ne le sera jamais.

Je veux au monde toute la mystique qui larde aux flancs les hommes pour les redorer ; je veux qu’ils se « croient » sans être rien ; oui, car Dieu ; c’est toujours croire qui réalise. C’est toujours en s’imaginant que les hommes ont piétiné tout d’abord, puis qu’ils ont courus ; sans qu’ils aient pu imaginer ô Dieu – ces grand-messieurs pédonculés – comment pourraient-ils aujourd’hui nous emmerdait avec leur « réalisme ».

Mais ce n’est pas qu’ils en manquent pourtant, d’imaginations, ces connards – c’est qu’ils nous croient bien vulgaire pourtant qu’ils nous foudroient l’orgueil – ils nous laissent d’être des pécores : ils synonimisent : et plutôt que d’imaginer ils entrevoient ; ils conjecturent : se representent, supposent ! Ah c’est que ces gentils-amis sont des gens très-sérieux, qu’on ne les prendra jamais à défaut de rêver, de songer – ils ont un grand-besoin de se figurer de ce qu’ils manquent de figure.

Et c’est de ce manque de prononciation ; ce manque d’intensité, ce manque de personnalité dont notre bon seigneur est une victime. Il ne sait pas impressionner, et se forge des valeurs soudaines qui le tiennent en hauteur pourtant que ses défaut l’abattent.

Et c’est faute d’effet, faute de n’avoir su parvenir, qu’ils se mettent avec lui à cartographier le chemin qui n’est à personne. Ils font de la géographie de ce qu’ils sont dépossédés.

Ils sont dépossédés pour n’être d’aucune condition, ni de leur village, ni même du bout du chemin – ils ont tant rejeté leur proches (les hommes ne pensent qu’à eux ! Les entends-t-on gémir dans leur purgatoire!) ces petit-faiseurs de complet-gris ; qu’ils sont ladres à toute-heure, déconvenues, et veules, sans-nom – diable, ils n’existent pas ! Alors ils se font du chemin la tradition des cornues ; vrai, ils se machinent des ombres au-delà leur conceptions ! Ils ont à croire que les hommes passeront leur péages – ces idiots. Il y a milles chemins où l’on marche, milles chemins où l’on voit les gens se réfréner.

Savez-vous ? Ils sont lasses de n’avoir aucun secret ; de ne rien garder, de n’être pas au moins l’homme-à-tout-faire. Ils n’auront rien pour n’avoir rien voulu, pour avoir donc penser qu’il était dû en ce monde que d’être un homme ou quelqu’un.

Ils croient pourtant qu’ils envisagent de ce qu’ils dévisagent : ils n’ont aucune splendeur aussi en leur si docte mémoires ou études - on ne retient jamais qu’un peu d’insistance travesties, ces philosophes conceptateurs ; qui ne sont qu’à être des mendiants.

Ils mendient l’attention, la considération – « mais non, jamais ! Je suis trop un aimable garçon pour qu’on puisse me donner la main et puis savez, on m’a fait beaucoup de violence dans mon enfance, j’ai été comme on dit ; garçon-manqué, garçon-mangé, garçon-violé – oh oui, comme pas un – j’en ai quelques fiertés traumatiques ; je suis heureux d’être ainsi plus encore »

Mais voyez plutôt, de ce que nous différons c’est que je ne louvoie rien ; je ne mens pas, je crois que je peux vivre au monde des choses - peu s'en faut ! ; que je me crois légitime à écrire, je ne dis pas « rapporter » ; comme je ne dis pas « étudier » pour ce que vous lisez. De ce que je me disperse, ils se répertorient. Ils appelleront cela un « fait ». Diable – qui sont ces pokers-menteurs qui se croient les hérons du réalisme-ravis ? Insupportables mensonges, plus encore au sein même de leur rhétorique – ils se fardent de tout un barda de préposition pour se prévaloir, pour se hisser.

Ils me rappellent ces professeurs qui cherchent à dédouaner leur banalités à renfort de superfétation : « c’est une question qui mérite d’être posé ! » cela de leur propre question.

Ils sont trop modestes voyez-vous ! Pour avouer, se confesser – ils préfèrent se dindoliner, faire le dos-rond, roucouler, purpurer – ah dieu, on n’aura pas assez d’un dictionnaire pour les faire entendre.

Bon pour les constipés de dire, comme me le dit un de nos illustre maîtres : « Je ne tiens pas beaucoup à ce que je fais trop facilement, et ne m’attache qu’à ce qui m’a demandé de la peine », nous disons nous que l’œuvre des fils de dieu fleurit sur le derme comme les fleurs sur un arbre – c’est à mon tour ce que je crois un fait des temps qui m’ont précédé ; et puisque les temps m’ont voulus donc, je ne cesserais pas d’exister pour convenir.

Et je le dis avec Pindare, on m’accusera de toutes sortes d’autorités, autant que j’y pousse la mienne – c’est toujours contre les hommes qui sont des femmes comme pas deux qu’il faut donc retrousser ses antiques pour montrer de ce qu’on a toucher leur cul ! – pardon messieurs-mesdames, d’être aussi coquin, si peu fidèle, amoureux en traits comme les ivrognes, mais je vous laisse à Pindare : « L’homme de talent est celui-là seul qui sait tout par nature ; mais ceux qu’à formes une étude pénible sont comme des corbeaux voraces et criards qui poussent d’inutiles clameurs contre le divin oiseau de Zeus ».

Autre chose. Le Grappin, qui alterne avec des extravagances, des passes belles à vous ranimer dans le sépulcre, met ces philosophes macareux en état d’équivoque, qui est donc ce que ces gens-simples haïssent le plus. Comme tout les simples, ces madonnes se prennent très-au-sérieux et se prenant très-au-sérieux, exigent que vous fassiez de même. Les valeurs qu’ils nous promeuvent comme annonciatrice d'une civilisation et parmi lesquelles ces grandes dames : la mesure, l'humilité. Aucune n'est tiré d'un raisonnement très simple : l'on n'enseigne pas l'humilité aux âmes qui sont timides ni plus encore la mesure à ceux qui auront pris le plis de se diminuer.

Non seulement il faut rester tel que le public vous veut, ces philosophes – mais il ne faut jamais laisser entendre qu’on est capable, à force de se connaître, d’un peu se deviner, se sentir, se présumer – et même se rire au nez. Dans ces réunions tupperware, de ces concepts-boitillets ; le premier philosophe qui rirait bien franc aura son gage. C’est un lieu-commun. Le malheur est qu’à force de feindre qu’on se prend au sérieux, et qu’on ne fait au monde que des choses d’importances ; qu’on ne se déprive jamais, ô dieu ! Qu’on asymptôte ! Et bien la feinte un jour ne l’est plus.

Tel de mes illustres maitres ayant, lorsqu’il se choisit la pair-de-dix de l’homme respectable – décidé que son personnage ne saurait être complet sans une canne, il l’avala sans prendre garde ; il en resta raide toute sa vie.

Moi je n’ai jamais été autre qu’un autre ; je n’ai jamais été que tous les personnages et aucun d’eux, surtout pas un seul – et je peux dire qu’enfant j’ai pris au sérieux la vie qui n’en demande pas tant. Puisque les hommes veulent qu’on les séduisent, qu’on les embrassent; j’ai cru bon pour ce monde de les séduirent, de les embrasser – Dieu, pourvu que madame ma police me fit sa primesautière.

Et de même, les philosophes craignent sans cesse qu’on ne leur manque de respect. Chez un Grappin qui veut d’abord être soi, il discerne avec force-raison un manque de considération à leur égard. Se refuser à l’hypocrisie, c’est faire fi de l’estime des hommes et de leur « mauvaises lectures ». Dans celui qui ne se soucies pas d’être bien fardéoler, fardé, remplumé – ces messieurs flairent des gens qui n’estiment pas qu’ils vaillent de se contraindre.

Ces philosophes croient toujours qu’on se préoccupe d’eux. Ecoutez-les se dire, se chuchoter, des uns des autres ; aussitôt qu’ils ont dit ou fait quelque-chose qui les dépassent, qu’alors ceux-ci ; ceux-là auront chercher à « impressioner », « faire de l’effet », « s’en sortir par le scandale » ; « épater le bourgeois ». Une personne qui emploient ces expressions et voilà, je l’entends comme une dénotation « un cuistre sent toujours sa cuisine ». Et dire ! Plus que je ne l’entends, pour les privilégier encore ces messieurs - lorsque je les entends user d’une expression pareil, je « subodore » le petit-bourgeois.

Vous dites du Grappin : « Il cherche à étonner, il use de bon mots » - Le Grappin ne cherche pas à étonner ; il étonne. Quand il vous étonne, il vous domine, s’il cherchait à vous étonner, ce serait lui qui s’abaisserait à feindre comme vous faites, de vous cherchez une nature comme à y prendre un pli.

Sachez-le bien pourtant, on ne fait pas une œuvre mes amis, en vue de vous – on ne fait rien en vue de vous plaire ni même de vous atteindre, ou vous choquez, ou vous tiédir, ou ce que vous pourriez croire dans vos superstitions. Il arrive qu’on vous plaise, comme il arrive qu’on vous choque – et cela chez nous n’a aucune différence.

Je suis de ces hommes qui sont de tout les moments : et je m’amuse à vous voir si retors, rampeurs de mes deux sous – allons ! Je ne vous dois rien, je ferais tout ; triste ou je serais heureux. Qu’importe.

 
 
 

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